La série Gojira dresse le portrait de l’île d’Oshima au Japon où vit le monstre Gojira. Dans le cinéma japonais des années 1960, ce lézard préhistorique est à la fois une métaphore des États-Unis et une allégorie des armes nucléaires en général. Cette série s’envisage comme ma vision de l’île au travers du prisme de son mythe, de son histoire et de ses paysages. Chaque photographie n’offre aucun contexte : à la fois attaque aérienne et simples fléchettes, coucher de soleil et bombe qui frappe le sol, touristes amassés dans un coin de mer et naufragés d’un bateau que le monstre aurait renversé. Mes images convoquent une diversité de styles et de références culturelles pour dresser les contours de cette île habitée par le monstre et son histoire.
Dans la plupart des cas, tout débute à partir de quelque chose que j’aurai vu ou lu dans une fiction, avant que je ne me mette en quête de sa forme concrète dans la vie réelle. A la fois de plus en plus proche d’un sujet (recherches documentaires en amont), je m’écarte malgré tout toujours du sujet premier (laboratoires du CNRS, plateforme de démantèlement d’aéronefs, monstre Godzilla, parties de paintball). Autour d’un univers étrange et atemporel (immobilité mortelle), je construit des images inspirées par les manuels de bricolage, le cinéma de genre et la science, jouant souvent un va-et-vient entre l’infiniment petit et le monumental. Mes photographies s’inspirent beaucoup d’autres images mythiques, retravaillant souvent à partir de notre imaginaire ou mémoire collective, et de la puissance symbolique de la photographie. Plus largement, je cultive un goût pour rapprocher des images étrangères et de sources disparates, considérant ces images comme des débris ou des résidus d’événements (Odds and ends). Mes projets se nourrissent de plus en plus d’un intérêt pour l’espace et la question des origines, sans doute intimement liés à mon amour pour la science-fiction.